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La sténose spinale lombaire

Dernière mise à jour : 14 sept. 2022


Dans l’absence d’explications approfondies, il peut être tout à fait normal de s’inquiéter, voir d’éprouver de la peur, en lisant certains diagnostics médicaux. Celui de ‘’sténose spinale lombaire’’ peut certainement susciter cette réaction! C’est bien connu, tout le monde peut craindre ce qu’il ne comprend pas, particulièrement quand ça concerne l’état physique de sa colonne vertébrale! Malheureusement, dans un système de santé sous pression qui va toujours de plus en plus vite, rarement prend-on suffisamment le temps d’expliquer et de s’assurer que le/la patient(e) comprend bien son diagnostic et ce qu’il implique. Ceci est regrettable, sachant que la peur, l’inquiétude, l’anxiété et la déprime sont autant d’éléments susceptibles d’exacerber une expérience douloureuse.

Faisons ici la lumière sur le sujet!

Est-ce que c’est fréquent ?

Oui! Si vous ou l’un(e) de vos proches avez reçu ce diagnostic, vous n’êtes pas seul(e). Le diagnostic de sténose spinale lombaire serait donné à plus de 103 millions de personnes dans le monde. Aux États-Unis seulement, on estime sa prévalence dans la population adulte à 11% des gens, une proportion qui augmente avec l’âge (Katz et coll, 2022). Le diagnostic est défini ainsi :


''Un syndrome douloureux au niveau de la fesse, de la cuisse ou de la jambe avec ou sans la présence de maux de dos. Ces signes et symptômes sont associés à un rétrécissement de l’espace disponible pour les structures nerveuses et vasculaires dans une portion de la colonne vertébrale lombaire'' (North American Spine Society, 2007).

Territoire habituellement associé aux symptômes d'une sténose spinale lombaire. Attention : toutes les ''sciatiques'' n'ont pas forcément pour cause une sténose lombaire.

Qu’est-ce que c’est ?

Le terme sténose est dérivé du grec et signifie tout simplement ‘’rétrécissement’’. Dans les sciences de la santé, on parle de sténose lorsque l’on observe sur un examen médical qu’une structure cylindrique comme un canal (foramen) ou un vaisseau est rétréci par rapport à son diamètre original. Ainsi, on peut retrouver une sténose chez différentes structures anatomiques de type canalaire : la sténose œsophagienne (système digestif) ou aortique (système cardio-vasculaire) en sont des exemples.

La sténose spinale elle, concerne la colonne vertébrale. On peut trouver des sténoses à n’importe quel étage du rachis, bien qu’on en retrouve plus fréquemment dans la région lombaire. Par de petits trous situés entre chaque vertèbre qu’on appelle les foramens intervertébraux, les nerfs émergent de la moëlle épinière et se divisent. Les nerfs peuvent ainsi cheminer, par exemple, vers les bras (colonne cervicale) ou vers les jambes (colonne lombaire) afin de donner de la force et de l’endurance à nos muscles (fonctions motrices) et de nous permettre de ressentir des sensations (fonctions sensitives).

Deux types de sténose sont possibles : la sténose foraminale et la sténose spinale centrale. La sténose foraminale (latérale) est la plus commune. Elle se situe au niveau du foramen intervertébral, un espace entre deux vertèbres par lequel chemine une racine nerveuse et des vaisseaux sanguins (voir image ci-dessous).

La sténose foraminale affecte un seul membre (la jambe pour la sténose au niveau lombaire). La sténose centrale se produit quant à elle dans le canal rachidien central. Elle peut causer des symptômes dans les deux membres à la fois.



Quels sont les signes et symptômes que l’on peut ressentir ?

Outre la douleur dans la jambe (et parfois au bas du dos), les symptômes peuvent inclure des manifestations neurologiques comme des engourdissements (paresthésies). Les jambes peuvent aussi se fatiguer plus rapidement. Ces symptômes sont habituellement amplifiés par l’extension lombaire (arquer le dos) ou la station debout prolongées. À l’inverse, les symptômes sont souvent soulagés par la flexion (arrondir le dos, par exemple en s’appuyant contre un comptoir ou un panier d’épicerie) et la position assise.



Pourquoi le canal se retrouve-t-il rétrécit ?

La réduction de la largeur du foramen peut s’expliquer par différents facteurs. Parmi ceux-ci, on retrouve :

  • Modification des contours osseux par le processus d’arthrose

  • Une poussée inflammatoire

  • Un kyste des facettes articulaires

  • L’épaississement d’un ou des ligaments de la colonne vertébrale

  • Une masse graisseuse dans l’espace postérieur épidural

  • Une congestion veineuse

  • Une ancienne fracture

  • Une scoliose

  • Des facteurs héréditaires (un canal congénitalement étroit)

  • Certains éléments plus graves (rares)*


* Même si cela est beaucoup plus rare, certains problèmes graves peuvent se cacher derrière une sténose spinale : une tumeur qui prendrait de l’espace dans le canal intervertébral par exemple. C’est pourquoi un examen médical pour écarter ces risques, même faible, se révèle souvent important, particulièrement si vous présentez d’autres symptômes de nature systémique, par exemple : une grande fatigue, des douleurs nocturnes, de la douleur généralisée, une perte de poids rapide, une atteinte des fonctions fécales et urinaires, etc.


Les sténoses spinales touchent davantage la population plus âgée. La majorité du temps, c’est le processus d’arthrose associé au vieillissement qui l’entraîne.


En prenant de l’âge, de façon généralement très lente, les disques intervertébraux vont voir leur contenu en eau diminuer et s’amincir. Puisque les disques agissent un peu comme des petits coussins entre chaque vertèbre, leur perte graduelle de hauteur apporte une réduction de l’espace où chemine une racine nerveuse. Avec le vieillissement, les contours osseux des vertèbres vont aussi fréquemment changer : ils peuvent s’épaissir ou développer des petits reliefs osseux (appelés ostéophytes). On parle parfois d’affaissement discal / dégénérescence discal, d’autres termes qui peuvent être très effrayant à lire sur un examen médical! Toutefois cette perte de hauteur des disques en vieillissant est tout à fait normal et n’est pas obligatoirement associée avec de la douleur. (Brinjikji, 2015)).

Ainsi, une sténose peut être ‘’fixe’’ ou plutôt transitoire, dépendamment des éléments qui l’entraînent. Une poussée inflammatoire, par exemple, finit par se résorber par elle-même, une fois les travaux de construction complétés par l'organisme! On sait qu’une hernie discale peut se résorber avec le temps. Si la sténose est temporaire, les symptômes entraînés se résorberont habituellement en même temps que la résolution du mécanisme qui l’entraîne.

Lorsque ce sont les contours osseux qui rétrécissent le foramen, les symptômes de la sténose sont plus difficilement modifiables avec le temps. Il est cependant intéressant de savoir que la condition est généralement très stable, c’est-à-dire qu’elle ne se détériore pas rapidement du tout (North American Spine Society, 2007)!

Aussi, puisque la douleur est un phénomène multifactoriel, il est souvent possible de l’influencer et de réduire considérablement les désagréments, même si l’apparence de la colonne vertébral ne se retrouve pas modifiée sur un futur examen médical !


Prise en charge multi-disciplinaire pour la douleur persistante


Comment le diagnostic est-il établi ?

Habituellement, le diagnostic est donné par le médecin en associant les symptômes relevés par le patient(e) à un examen médical démontrant une réduction d’un foramen correspondant aux symptômes. La résonnance magnétique est traditionnellement l’outil utilisé par les radiologistes pour confirmer une sténose spinale lombaire.

Toutefois, des recherches récentes ont démontré qu’il n’existe pas de standards fiables pour normaliser à partir de quelles mesures une sténose devient problématique. Par exemple, une étude à trouvé des sténoses spinales chez 65% des adultes d’une cohorte de sujets asymptomatiques (sans symptômes!) (Haig et coll, 2006).


Eh oui, ce n’est pas parce qu’on a une (ou des) sténoses que cette dernière entraîne obligatoirement des répercussions négatives!

D’autres études ont montré que l’électromyographie (EMG) constituait un examen plus fiable et avec une meilleure association avec les symptômes de la sténose que la résonnance magnétique seule. Cet examen permet aussi d’éliminer les autres causes pouvant entraîner des symptômes similaires dans le membre inférieur (Yagci et coll. 2009)


Pour un(e) patient(e) qui soupçonne que ses symptômes dans le membre inférieur sont liés à une sténose lombaire, il serait donc intéressant de procéder à une résonnance magnétique (IRM) accompagné d’un EMG pour valider le diagnostic.


Que peut-on faire?

Sténose ou pas, les maux de dos persistants sont rarement issus d’un seul élément physiologique. La majorité du temps, des facteurs psycho-sociaux et associés aux habitudes de vie viennent exacerber la condition (Chou et coll, 2009). Par exemple, la dépression, l’obésité, les troubles du sommeil et le déconditionnement physique représente autant de facteurs connus de douleur chronique sur lesquels il est possible d’agir concrètement.

La réhabilitation physique avec une emphase sur l’exercice est souvent efficace pour réduire la douleur et les limitations associé aux maux de dos persistants.

Mobilisation du rachis lombaire en flexion et décompression manuelle

Dans une recherche récente, des patient(e)s avec sténose spinale symptomatique ont été pris en charge avec des méthodes non-chirurgicales pour mesurer l’effet de ces méthodes par rapport à l’approche chirurgicale. Parmi les interventions utilisées, on leur suggérait certaines modifications de leurs habitudes (par exemple, s’assoir quelques minutes lors de l’apparition/amplification des symptômes), la prise de médicaments anti-inflammatoire non-stéroïdien à utiliser au besoin ainsi que de la thérapie par l’exercice.

Auto-décompression lombo-sacrée


3 ans plus tard, un tiers d’entre eux environ rapportaient des améliorations considérables de leur état.


Seulement approximativement 15% des patient(e)s rapportaient que leur état s’était détérioré durant cette période. Ce n’est certes pas un miracle, mais cela vaut définitivement la peine de l’essayer avant de penser à une chirurgie!


Intervention chirurgicale ?

Lorsque la réhabilitation par l’exercice et la prise en charge de la douleur par une équipe multidisciplinaire n’entraînent pas de changement sur une période de plusieurs mois / années, il existe une chirurgie avec un taux de satisfaction avoisinant 75% (Ogura, 2020). En effet, selon les recherches la laminectomie décompressive semble montrer un meilleur taux de succès ainsi que des risques de complications plus faible que la fusion lombaire, une autre opération couramment pratiquée (Katz, 2022).


En conclusion

La sténose spinale lombaire est un diagnostic commun, particulièrement chez les aînés(e)s. En se fiant à la littérature scientifique disponible en 2022, l’intervention de choix devrait comporter les éléments suivants :


  • Stratégies pour offrir des options de postures (ergonomie) ou de modification du temps passées à faire certaines activités.

  • Gestion de la douleur via des modalités analgésiques (pharmacothérapie, thérapie manuelle, thermothérapie, tractions, etc.)

  • Thérapie par l’exercice et prise en charge multi-disciplinaire au besoin

Pour ceux et celles dont la qualité de vie est profondément affectée et qui ont essayé des modalités conservatrices sous la supervision d’un(e) professionnel(le) de la santé pendant plusieurs mois sans aucune amélioration ou détérioration de la condition, la chirurgie peut alors être envisagée. La procédure de choix selon la littérature semble être la laminectomie décompressive. Mentionnons que les bénéfices à long terme des injections épidurales pour cette condition n’ont pas encore été prouvé dans la littérature (Katz et coll, 2022).

 

Nicolas Blanchette pratique l’ostéopathie et la kinésiologie avec son équipe Ostéo-Solution sur la Couronne Nord de Montréal. Vous pouvez prendre rendez-vous directement en ligne.

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Sources Katz, Jeffrey et coll. Diagnosis and management of lumbar spinal stenosis : a review, JAMA, 2022

Autres sources dans le texte

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